Une semaine à Lisbonne

Une semaine pour s’imprégner de Lisbonne

mur coloré et graffé à LisbonneUne semaine à Lisbonne pour ressentir la capitale, s’en imprégner, divaguer au gré de l’inspiration, se laisser envahir par l’ambiance en toute innocence, en toute ignorance, découvrir ce lieu au risque d’en oublier l’un des principaux monuments, sans guide, sans préjugé, sans intention, juste vivre une semaine tout à l’ouest, sans rien en attendre de particulier, la regarder, la vivre, la saisir avec mon corps, mes yeux, ma sensibilité. « Tout sentir de toutes les manières » a écrit Fernando Pessoa.

C’est un album de ville par l’expérience d’errance, sans discours, sans préparation préalable, la réalité en face à face, vulnérable, comme un témoignage lucide d’un instant. Des images déversées en vrac, sans mise en scène, le lieu comme terrain de jeu, une promenade réelle dans un espace virtuel à moins que cela ne soit l’inverse, spectacle changeant par le magicien du ciel qui joue avec la lumière. « La vie n’est rien si l’art ne vient lui donner un sens » dit Fernando Pessoa qui parle aussi de la « surabondance insaisissable du réel ».

tram Electrico à Lisbonne devant un immeuble jaune

Electrico ligne 28

Livre photo agrémenté de textes reconstituant l’histoire de la capitale du Portugal et du voyage de l’auteur.


Une échappée hors de la ville

Un chemin de terre s’échappe du village, un large chemin emprunté par les tracteurs et les moissonneuses. Ma voiture en a vu d’autres, j’impose ce parcours au risque de l’incident. Sans folie pas de joie, pas de découverte. Anne adore ces petites virgules imprévues.

– Regarde-là, c’est magnifique, cet arbre, seul, bleu, perdu dans l’immensité de l’or… Arrête-toi, je veux le toucher, le remercier… dit-elle avec avidité.
– Le remercier ?
– Oui, le remercier d’être-là, l’encourager à résister aux tempêtes et aux hommes…
– C’est peut-être un homme qui l’a planté là ?
– Ça m’étonnerait, il ne serait pas si beau !
– Il n’est pas bleu non plus…
– Si, mais toi tu ne vois pas ça, t’es pas peintre !

Elle l’entoure de ses bras, l’embrasse et lui parle en sourdine. Elle se tourne et pose son dos contre lui, la colonne vertébrale en communion avec le tronc et elle regarde l’immensité pastel du ciel. Deux minutes ont suffi…
– On y va ?
– Oui…

L’arbre, respiration des saisons

L’arbre est le poète parmi les cubes et les lignes droites, les rigidités et le rigorisme, il est la respiration et le marqueur des saisons. Sans lui, l’urbain ne connaîtrait que la vérité des calendriers et des horaires de transports, ce temps segmenté qui emprisonne. La poésie de la nature doit prendre le pas sur les discours futiles, elle devrait servir le langage quotidien pour traduire le beau qui échappe au passant pressé et aveugle.

Lisbonne moderne Parc des Nations

Parc des Nations

Le nouveau Lisbonne, bitumé

Chaque perspective est un nouveau tableau où apparaissent des âmes fantômes. Comme un homme invisible, je regarde se mouvoir les êtres dans les méandres d’une architecture de verre et de ciment délavé. Je m’interroge toutefois sur ce paysage artificiel, aseptisé, presque virtuel, ennuyeux, cafardeux, froid, où est la poésie ? Les hommes s’éloignent de la terre, le nouveau monde n’est que l’apologie de la rectitude. (…) Tout est bitumé, bétonné, carrelé et ferraillé de verticales pour ne pas y laisser traîner la moindre courbe vivante et folâtre. Il est vrai que dans cette rigoureuse recherche de propreté maniaque, dans ce purisme rectiligne et sévère, le photographe peut y trouver de l’esthétique mais une esthétique invivable. Ici sera donc le nouveau Lisbonne, voilà ce qui est prédit et commencé. Les voies du futur sont déjà en place avec le pont Vasco-de-Gama, une gare ultramoderne au look de palmeraie et même un téléphérique inutile longeant le quai, qui ne permet pas d’aller d’un point à un autre en hors saison, seulement offrir un tour de manège sur les infrastructures d’une cité vide. Et tout cela est d’une splendeur glaciale et désolante de solitude infinie.


Une semaine à Lisbonne, 2012
Textes et images : Charles Montécot
Ouvrage d’art, 214 pages
Livre uniquement sur commande.
Ouvrage en tirage limité, numéroté et signé par l’auteur.
Epuisé

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